Cela fait maintenant 2 ans que nous entendons souvent les mêmes questions sur les choix de vie que nous avons fait. Bien souvent, ce sont des aprioris qui viennent d’une méconnaissance ou d’une peur, j’avais donc envie de répondre à ces questions et « tordre le cou » à ses idées reçues trop souvent entendues… Avant de commencer à essayer d’y répondre, juste un petit éclairage sur ce qu’est le nomadisme moderne. Le nomadisme est définit par le petit Larousse comme un « genre de vie caractérisé par le déplacement des groupes humains en vue d’assurer leur subsistance. »
Il n’y a pas de définition « officielle » du nomadisme moderne, étant à la fois un mode de vie qui évolue constamment et qui est plutôt tendance actuellement. On pourrait tenter de définir le nomade moderne comme un : être humain pour qui les questions de territoire et de sédentarité sont secondaires, et qui recherche une certaine mobilité (professionnelle, ponctuelle ou régulière) dans son mode de vie. Ce n’est pas tout à fait satisfaisant mais je n’ai pas mieux pour l’instant…
Passons maintenant aux idées reçues que ce mode de vie fait naître dans les esprits :
- Il faut avoir de l’argent
- C’est dangereux
- Un gros véhicule est important pour avoir le confort et la place indispensable
- C’est une façon de profiter de la société
- C’est une chance de pouvoir voyager
- Les autres sont obligés de travailler (pour que vous puissiez vivre des aides sociales)
- C’est un mode de vie marginal
- ça rend dépendant des autres
- Ce n’est possible que quand on est jeune et sans enfants
- Vous devez vous sentir seul et isolé
1 – Il faut avoir de l’argent
Alors j’aurais tendance à vous répondre oui, et non… Si l’on rentre dans les « nomades modernes » les personnes ou familles qui partent plusieurs mois en voyages à l’étranger, elles prévoient effectivement un budget équivalent à leurs besoins en transport, hébergement et activités dans les pays visités. Ce qui peut monter assez vite selon les zones… Mais être nomade ne veut pas forcément dire voyager loin et vite, vous pouvez donc avoir peu de moyens et vivre frugalement avec les moyens du bord, les producteurs locaux, de votre propre cueillette, etc. Certains traversent le monde à pieds, d’autres ne déplacent leur véhicule que de quelques kilomètres de temps en temps. Une partie prends l’avion ou les transports en commun, une autre utilise son propre véhicule, de la simple voiture au poids lourd en passant par le bateau ou encore le vélo.
Pour nous : clairement, nous ne faisons pas partie de ceux qui ont de l’argent. Certaines fins de mois (qui durent parfois 2 semaines) sont difficiles, mais nous bougeons moins et trouvons d’autres moyens pour subsister. Pourtant nous nous déplaçons régulièrement, mais sans forcément aller très loin, tant que notre « maison » bouge avec nous, nous sommes partout chez nous !
2 – C’est dangereux
Si je veux être un peu sarcastique, je répondrais que la vie est un risque. Si je veux être plus sérieuse, je dirais qu’il n’y a pas forcément plus de risques à vivre en nomade que dans une maison barricadé avec pleins d’alarmes… Disons que la vie en camion suscite moins la convoitise, mais là encore tout dépend du véhicule. Je crois que là on touche surtout à la peur et la confiance que l’on peut accorder à la nature humaine : on peut vivre dans la peur du vol, de l’agression, et faire tout ce qui est possible pour éviter les risques. Ou alors on peut vivre en se disant que le risque existe, en restant prudent, mais sans s’empêcher de rester ouvert à l’inconnu. C’est à chacun de voir où sont ses propres limites…
Si vous croyez que l’aventure est dangereuse, essayez la routine elle est mortelle !
Paulo Cohelo
Pour nous : nous avons dormi en forêt ou au bord d’une plage, sur des parkings tranquilles ou dans des quartiers bruyants, seuls ou entourés d’autres véhicules. Nous avons eu peur 1 fois, même s’il n’y avait pas d’agression directe envers nous, et nous nous sommes déplacés parfois quand nous constations que l’endroit choisi était un lieu de rendez-vous, où nous ne nous sentions pas suffisamment en confiance pour dormir avec les enfants. La peur ne fait pas partie de notre quotidien.
3 – Un gros véhicule est important pour avoir la place et le confort indispensable
Si la volonté est de retrouver l’espace et le confort d’une vie sédentaire, il y a effectivement du boulot… Mais le choix de vie nomade est aussi un renoncement à certaines choses, un choix qui permet de faire le vide et de ne garder que ce qui devient essentiel. Certains nomades vivent dans des camions ou camping-car, d’autres avec leur tente de toit pour dormir et un véhicule pour stocker les affaires et le matériel, d’autres uniquement leur sac à dos plus une tente, ou bien prennent des locations au fil de leur route. Il y a tellement de possibilité que chacun peut choisir ce à quoi il veut renoncer. La taille importe peu comme on dit…

Pour nous : nous avons un camping-car de 6m80 pour 4. Il date un peu (1993) et n’a donc pas toutes les fonctionnalités d’un camping-car dernier cri. On peut même dire qu’il n’est pas idéal dans son aménagement et son équipement. Mais nous nous sommes fait à ce dont il dispose et avons même envisagé plus petit, comme quoi…
4 – C’est une façon de profiter de la société
Haaa celle-là, on l’entend pas mal ! Il paraît que ceux qui choisissent cette vie critiquent la société mais sont ceux qui en profitent le plus (sous-entendu les aides sociales, les structures publiques, les espaces aménagés, etc). Tout d’abord, j’aimerais répondre à ceux qui pensent cela (tout bas ou bien fort) que nous ne sommes pas forcément anti-société : la plupart de ceux rencontrés jusque là assument le fait de ne pas être d’accord avec tous les fonctionnements et règles de notre société, mais ne veulent pas forcément la détruire ! Reconnaître les défaillances et les manques n’empêche pas de voir aussi les réussites et les évolutions positives. On dit bien profiter de la vie, pourquoi ne pas profiter également de ce que « propose » notre société sans en abuser ?
Pour nous : nous utilisons les aires de camping-car, l’eau gratuite, les parkings aménagés et gratuits, les médiathèques, etc. Mais nous payons aussi le camping, les services comme l’électricité, faisons nos courses… Et nous essayons de contribuer à notre société d’une manière différente, peut-être moins financière mais j’espère bien plus humaine !
5 – C’est une chance de pouvoir voyager
La chance, c’est quelque chose qui nous tombe dessus sans que l’on n’ai rien demandé. Cette chance elle s’invente, elle se créé, elle n’arrive pas comme ça (sauf si vous gagnez un voyage tout frais payé, là c’est un coup de chance). Voyager c’est un rêve pour beaucoup de monde, parce que c’est l’image des vacances, des visites, de la nouveauté. Être nomade, c’est vivre la nouveauté à quelques kilomètres, c’est essayer de créer un mode de vie qui ne nous oblige pas à attendre les vacances pour s’évader, et prendre le temps de visiter ce qui arrive sous nos yeux. Le voyage est avant tout intérieur, tout à chacun peut voyager sans prendre l’avion, comme d’autres peuvent faire des milliers de kilomètres sans rien voir de ce qui les entoure. La chance que nous vivons est ici une simple question de perception !
Pour nous : nous ne sommes pas encore allés très loin, et la pandémie nous a fait revoir à la baisse notre envie de découvrir l’Europe dès cet été. Mais peu importe, notre voyage a commencé il y a 2 ans, d’abord dans nos têtes, puis dans tous les aspects de notre vie. Et comme le dit un proverbe gitan :
Ce n’est pas la destination qui compte, mais bien la route.
6 – Les autres sont obligés de travailler (pour que vous puissiez vivre des aides sociales)
Alors je vais peut-être vous étonner sur ce sujet, mais nous aussi nous sommes obligés de travailler ! Certains nomades travaillent à distance, proposent des services sur leur route, ou bien font des saisons ou de l’intérim. Ceux qui bénéficiaient déjà du RSA, de l’AAH ou de toute autre aide sociale dans une vie sédentaire ne s’ouvrent pas plus de droits en choisissant la vie nomade, bien au contraire : pas d’APL ou d’aide au logement, pas de possibilité d’utiliser des chèques énergie auprès d’un fournisseur, etc… Certains nomades, par désir de ne pas dépendre de la société ou par méconnaissance de leurs droits ne font pas la demande de certaines aides, car ce n’est pas simple d’être accompagné par une assistante sociale ou un conseiller emploi quand on n’a pas d’adresse fixe où rester plusieurs mois…
Pour nous : suite à ma rupture conventionnelle et la démission de Patrice, j’ai touché des allocations chômage et travaillé à temps partiel lorsque nous en avions la nécessité et que Patrice ne trouvait rien à temps plein. Je travaille à créer mon activité indépendante à distance et Patrice cherche à se former pour sa propre activité. Nous essayons d’équilibrer vie familiale et vie professionnelle dans le couple et tout en restant disponibles pour les enfants. Ce n’est pas le plus simple mais c’est un choix que l’on ne regrette pas…
7 – C’est un mode de vie marginal
Marginal veut bien dire « en marge de la société », hors normes, ce n’est donc pas complètement faux. Mais nous faisons aussi partie de cette même société, à laquelle nous contribuons à notre manière, certes différente. Beaucoup de choses actuellement vues comme « normales » ont été marginales à un moment, souvenez-vous : l’homosexualité, le divorce et le remariage, les femmes qui conduisent des poids lourds, les hommes qui s’occupent des enfants et mettent leur carrière en second plan, etc. Les normes auxquelles nous nous référons sont celles de notre société actuelle, mais il suffit d’aller voir juste un peu plus loin pour constater que ces normes peuvent être différentes et évoluer. Alors finalement, être marginal à un moment donné peut signifier également être visionnaire, être créatif, ou encore être libéré de la pression sociale. Et si on y regarde de plus près, nous sommes de plus en plus nombreux à être marginaux, donc finalement de moins en moins marginaux, vous me suivez ?
Pour nous : nous avions l’impression de nous lancer dans un grand bain d’inconnu lorsque nous avons pris cette décision. Puis en nous intéressant de plus prêt à la question, en recherchant sur les réseaux, on s’est rendu compte qu’il y avait tout un tas de familles à avoir vécu ou à envisager cette expérience. Nous sommes rentré dans un nouveau monde que l’on ne voyait pas avant mais qui est extrêmement vivant, riche et peuplé de gens de tous horizons !
8 – Ça rend dépendant des autres
Je trouve cette question vraiment intéressante car cela remet en question un sujet essentiel de notre société moderne : faut-il s’en sortir seul pour tout, ou savoir demander de l’aide ? Peut-on être coopératif si on est individualiste ? Être indépendant signifie-t-il n’avoir besoin de personne ? C’est un paradoxe de notre société où l’on nous pousse vers l’indépendance financière, mais où l’on ne sait pas à être autonome (on peut tout ACHETER mais personne ne nous apprend à cultiver, entretenir, réparer). Il faut se sentir fier de s’en sortir seul, et celui qui demande de l’aide serait vu comme un profiteur, un faible, un parasite ? Non, je crois bien plus au pouvoir de l’INTERDEPENDANCE que de l’indépendance. Personne ne sait tout faire, personne ne peut tout produire ou tout réparer, et c’est bien les compétences et capacités de chacun mises en commun qui permettent à une société d’être complète et autonome. Seuls nous ne sommes rien que nous-même et seront toujours dépendants, ensemble nous pouvons collaborer, coopérer et partager nos connaissances et compétences. Nous formons un tout.

Pour nous : notre objectif est d’être le plus autonome possible et globalement on s’en sort. Mais aller prendre une douche chez des amis, partager un repas, est un échange et une occasion de se voir, de prendre un moment ensemble, d’apporter quelque chose (des vêtements pour les enfants, un gâteau, une discussion qui fait réfléchir, etc). Cette vie nous a appris à accepter l’aide de nos amis, même si nous n’aurions pas osé la demander. Nous rendons service lorsque cela est possible et à qui en a besoin. L’échange n’est pas nominatif ni limité dans le temps !
9 – Ce n’est possible que quand on est jeune et sans enfants
Cette idée vient beaucoup d’une peur de manquer de « biens » et de sortir de la norme. Certes, l’organisation n’est pas la même pour une personne seule, un retraité, ou une famille, mais cela ne veut pas dire que c’est impossible ! Le mode d’habitation peut être différent, la façon de bouger peut être guidée par d’autres objectifs, et la vie quotidienne prendra un autre rythme. Mais rien n’empêche une famille d’être nomade. Ce qui nous fait entrer dans la sédentarité est lié au travail et à l’école, voir à la vie sociale : l’instruction en famille étant un droit, le travail à distance une possibilité, et les échanges sociaux ne se limitant pas à un cercle restreint, ce mode de vie est accessible à qui veut s’en donner les moyens. Tant que cette option est vécue comme un choix assumé par les parents, les enfants s’adaptent et profitent pleinement de cette vie, même différente.

Pour nous : nous nous sommes lancé dans cette vie alors que nos enfants étaient scolarisés et que nous avions tous 2 un CDI. Nos options professionnelles se sont donc adaptées à la vie que nous avons choisie, et les enfants seront en instruction en famille à partir de la rentrée prochaine, le temps pour nous de nous sentir prêt à cette nouvelle aventure. Nous avons fait ces choix pour nous mais surtout pour eux, pour leur montrer que chacun peut choisir la façon dont il veut vivre, tout en leur permettant d’avoir accès à la nature, la liberté, et le monde qui les entoure.
10 – Vous devez vous sentir seul et isolé
Cette peur d’être isolé du reste du monde et de manquer de vie sociale, notamment pour les enfants, n’a rien de réelle ! Certains nomades partent pour vivre isolé, par choix, parce que ce qu’ils recherchent c’est la tranquillité et la solitude, et cette vie le leur permet plus que de vivre dans un appartement en ville, tout en coûtant moins cher. Pour d’autres, c’est un moyen de rencontrer du monde, d’aller vers les autres plus facilement et en même temps de s’en éloigner quand ils le souhaitent. Les nomades modernes que le veulent sont très présents sur les réseaux, dans des groupes pour partager des spots, des astuces cuisine ou des lieux de rencontres. Ceux qui ne le veulent pas on ne les voit pas, et c’est leur choix !
Pour nous : je crois que nous n’avons jamais eu une vie sociale aussi riche que depuis que nous sommes nomades ! En plus des amis de longue date et de la famille que nous continuons à voir, nous avons rencontré beaucoup d’autres familles ou personnes vivant autrement, et c’est un des aspects les plus riches de cette vie ! Et lorsque nous voulons nous retrouver entre nous, dans notre petit cocon familial, nous allons là où nous pourrons le faire, sans avoir à fermer nos volets. Les enfants retrouvent petit à petit leur spontanéité dans les contacts, et nous sommes toujours contents d’échanger avec les curieux, les nomades qui se sont posés, les nouveaux ou ceux qui rêvent de le devenir !
Bon, je vous passe les commentaires comme quoi nous serions tous des hippies fumeurs de ganja, ou des « punks à chien » juste parce que nous avons un chien et les cheveux rouges… Ceux-ci sont plus des préjugés que des idées reçues, si vous voyez la différence 😉…
Wahou genial ce petit article, merci merci merci!alors on se reconnait tout a fait dans ce que vous dites.on a eu un sourire jusqu’aux oreilles quand on a vu votre vehicule…on a le même !!!!!!😉😉😉😉😉😉😉
On est aussi parti pour un tour d europe avec nos deux filles mais le confinement a freiner le projet enfin remis la destination du projet…nous allons donc voyager en france tellement de belles choses a voir…au plaisir peut etre un jour de se voir sur la route.bonne route pleins de goods vibes a tous
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Merci beaucoup pour votre retour 😊! Au plaisir de se croiser sur les routes de France ou d’ailleurs 🤗
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